Image de couverture : Etabli du livre - Claire Masfrand ©Beganne
Pouvez-vous présenter votre parcours ?
J’exerce le métier de relieur-doreur à L’établi du livre à Rezé (44), depuis 2017. Mon métier consiste à fabriquer ou restaurer manuellement tous types de livres. Je suis diplômée d’un Master 2 ID « Informatique et Document » à Lille. J’ai ensuite travaillé pour l’entreprise Naoned, qui édite des logiciels spécialisés dans les archives du patrimoine culturel. Mais il me manquait le côté manuel. J’ai longtemps voulu être documentaliste et j’ai toujours été attiré par le papier et les métiers du livre, j’ai donc entamé une reconversion professionnelle. En 2016, je m’oriente donc sur un CAP Art de la reliure-dorure, que je passe en candidat libre après avoir suivi des cours au Musée de l’Imprimerie de Nantes, auprès d’Evelyne Coignet, puis j’ouvre mon atelier. L’établi du livre fait aujourd’hui partie de l’annuaire officiel des métiers d’arts de France¹.
Quelles sont vos missions et en quoi consiste votre métier ?
Au quotidien, mon temps de travail est divisé en plusieurs activités.
- La plus importante est la reliure d’ouvrages et la réparation de livres abîmés, venant majoritairement de commandes de particuliers. Je commence toujours par faire des recherches sur les livres pour déterminer les matériaux que je peux utiliser. Je travaille ainsi avec plusieurs types de matières, selon la couverture originelle des livres qui sont à réparer. Je réalise des reliures selon les demandes : traditionnelles, contemporaines et originales. J’utilise des matériaux du réemploi comme le bois, le plexiglas ou le similicuir.
- La seconde est la création et la gestion d’ateliers. Je propose des ateliers de découverte à destination des enfants et des adultes. Ces ateliers permettent au public de s’approprier et d’apprendre les différents aspects du métier de relieur. Les ateliers sont accessibles de 6 à 17 ans pour les enfants, l’âge varie selon les sujets et thèmes abordés. Pour les adultes, je propose de les accompagner dans la répartition de leurs livres et de leur présenter mon savoir-faire.
Afin de continuer à valoriser mon savoir-faire, j’ai rejoint l’action Jeunes-Pros. Cet engagement s’inscrit dans la continuité de mes ateliers et mon envie de transmettre mon métier et de le faire découvrir au plus grand nombre.
- À côté de ces deux activités importantes, être à mon compte m’oblige à m’occuper d’une partie administrative : comptabilité de l’entreprise, gestion des commandes, etc. La communication est également importante pour promouvoir l’atelier et toucher de nouvelles personnes.
En résumé, mon métier et le fait d’être à mon compte impliquent d’être multitâche, autonome et organisé. Il faut aimer les livres et savoir faire preuve de minutie. Les ateliers me permettent de transmettre un savoir faire qui me passionne et m’ont appris à animer un groupe, faire preuve de patience et être pédagogue.
1, 2, 3 : Claire Masfrand
4 : Alice Emeriau - ©Beganne
Partager votre savoir-faire vous tient à cœur, avez-vous d’autres actions dans ce sens ?
Je travaille au Trois 8, un atelier partagé avec d’autres professionnels des métiers d’art. Tous les résidents font partie de l’association CAVIAR (Compagnie pour les Arts Visuels Illimités À Rezé) qui regroupe des métiers du domaine de la poterie céramique, de la peinture, du modelage et des arts plastiques entre autres. Le fait de travailler dans un lieu avec différents métiers m’apporte beaucoup au quotidien. Cela permet notamment de créer de nouveaux projets qui lient différentes disciplines et personnes. Avec Géraldine Cornière, peintre et sculptrice, nous avons créé des livres uniques qui mêlent reliure et peinture.
En dehors de cette association, j’interviens dans des écoles aux côtés d’Adrien Thiot-Rader, illustrateur et bédéiste. Nous confectionnons des livres, en associant nos savoir-faire et en développant la créativité des enfants puisque c’est à eux d’inventer les histoires. Nous encadrons les élèves, en développant leur imagination mais aussi leurs capacités manuelles grâce aux arts plastiques. Ces activités concrètes sont très appréciées car cela permet aux élèves de se projeter sur une activité dans le temps.
Comment envisagez-vous votre métier dans le futur ?
Dans le futur, je n’envisage pas mon métier seule. J’ai envie de le développer et de réaliser plus de projets hybrides qui permettent les échanges et les croisements avec d’autres métiers d’art. J’ai déjà commencé à faire quelques collaborations avec mes partenaires d’atelier. Je travaille avec mes collègues sur des binômes d’ateliers où ils animent des ateliers autour de la peinture ou du dessin, et je fais fabriquer les livres à partir des réalisations obtenues.